C’est une annonce qui fait du bruit dans les forêts de Transylvanie… et dans les sphères politiques comme écologiques : la Roumanie abriterait désormais près de 13 000 ours bruns, soit bien plus que les 8 000 estimés jusqu’à présent. Cette réévaluation majeure, dévoilée par le gouvernement roumain le 10 avril 2025, s’appuie pour la première fois sur des données ADN scientifiques issues d’un vaste projet lancé en 2021.
🔬 Une première : l’ADN au service du recensement
« Pour la première fois dans l’histoire de la Roumanie, nous pouvons déterminer sur la base d’éléments scientifiques solides le nombre d’ours présents dans nos forêts », a déclaré le ministre de l’Environnement, Mircea Fechet.
Financé à hauteur de 11 millions d’euros par l’Union européenne, le programme s’est appuyé sur 24 000 échantillons de déjections et de poils d’ours prélevés à travers le pays. Résultat : une population estimée entre 10 419 et 12 770 individus, alors que le seuil considéré comme “optimal” est fixé à 4 000 par les autorités.
⚠️ La cohabitation hommes / ours sous tension
Si cette richesse en biodiversité place la Roumanie comme le pays européen (hors Russie) avec la plus grande population d’ours, elle soulève aussi de graves préoccupations sur la cohabitation avec les humains. Ces dernières années, les incidents se sont multipliés :
- En 2023, 7 500 appels d’urgence ont été enregistrés en lien avec des ours.
- En 20 ans, 26 personnes ont perdu la vie et 274 ont été grièvement blessées.
- Tout récemment, un homme a été attaqué dans une station de montagne et se trouve dans un état critique.
L’an dernier, la mort tragique d’une jeune randonneuse avait déjà poussé le gouvernement à doubler les quotas d’abattage, avec près de 500 tirs autorisés, dont 400 effectués.
🏛️ Vers un changement de statut pour l’ours ?
Face à cette situation, le ministre a annoncé vouloir accorder plus de liberté d’action aux maires, pour permettre des interventions rapides dans les zones habitées. Il souhaite également demander à Bruxelles de retirer l’ours de la liste des espèces strictement protégées, ce qui permettrait une gestion plus souple et potentiellement plus létale.
Mais cette proposition ne fait pas l’unanimité. Le WWF a exprimé ses réserves quant aux données présentées, et le biologiste Cristian-Remus Papp a pointé un manque de transparence dans le recensement : « Il y a de nombreuses inconnues et des incohérences », a-t-il affirmé à l’AFP.
🧭 Quelle voie pour demain ?
La situation en Roumanie soulève une question universelle : comment concilier protection de la biodiversité et sécurité des populations ? L’explosion démographique des ours bruns, qu’elle soit réelle ou surestimée, nécessite une gestion fine, éthique et scientifiquement rigoureuse.
L’abattage est-il la seule option ? Ou peut-on imaginer des solutions alternatives : meilleure gestion des déchets, corridors écologiques, programmes de relocalisation, dissuasion non létale ?