« Jâai cru que câĂ©tait un requin ». Cette phrase glaçante, prononcĂ©e par une jeune nageuse au large de Long Beach, en Californie, a Ă©tĂ© reprise en boucle ces derniers jours par les mĂ©dias amĂ©ricains : CNN, ABC, CBS⊠Et pour cause. Les agressions dâhumains par des otaries se multiplient sur la cĂŽte ouest des Ătats-Unis, et les scĂšnes Ă©voquent davantage un film dâhorreur quâun documentaire animalier.
đ Lors de son entraĂźnement en mer, lâadolescente a Ă©tĂ© mordue Ă plusieurs reprises par une otarie avant de regagner la plage, choquĂ©e mais heureusement peu blessĂ©e. Un mois plus tĂŽt, un surfeur a racontĂ© une scĂšne similaire : « Elle avait lâair possĂ©dĂ©e, comme dĂ©moniaque », dit-il de lâotarie qui lâa attaquĂ© sans prĂ©venir.
â ïž Des comportements anormaux⊠mais pas sans explication
Si ces attaques sont spectaculaires, elles ne relĂšvent pas de lâanimal « mĂ©chant » ou devenu fou. Ces otaries sont en rĂ©alitĂ© victimes dâune toxine marine, produite par une algue nommĂ©e Pseudo-nitzschia. Cette algue microscopique, en apparence inoffensive, peut prolifĂ©rer sous certaines conditions et produit alors de lâacide domoĂŻque, une puissante neurotoxine.
đ§ Chez les animaux marins qui lâingĂšrent (en consommant du poisson ou du plancton contaminĂ©), les effets sont dĂ©vastateurs :
- Désorientation
- Convulsions
- AgressivitĂ© extrĂȘme
- Paralysie et mort dans les cas graves
Les otaries ne sont pas les seules touchĂ©es. Dauphins, lions de mer, oiseaux marins⊠Tous peuvent ĂȘtre intoxiquĂ©s. En ce moment, les associations de sauvetage animal rĂ©cupĂšrent des dizaines dâanimaux Ă©chouĂ©s chaque jour sur les plages californiennes.
đĄïž Un phĂ©nomĂšne naturel⊠amplifiĂ© par la crise climatique
Les pseudo-nitzschia ne sont pas nouvelles dans lâocĂ©an Pacifique. Mais leur prolifĂ©ration devient plus frĂ©quente et plus intense, selon les scientifiques. Plusieurs facteurs sont en cause :
- Réchauffement climatique
- Acidification des océans
- RemontĂ©es dâeau riches en nutriments
- Et peut-ĂȘtre mĂȘme les incendies de janvier dernier Ă Los Angeles, qui auraient modifiĂ© la chimie locale de lâeau
đ Ces « efflorescences algales » surviennent habituellement tous les 4 Ă 7 ans. Mais les chercheurs tirent la sonnette dâalarme : le phĂ©nomĂšne sâintensifie et les consĂ©quences sur la faune marine sont sans prĂ©cĂ©dent.
đŹ Que peut-on en tirer ?
Ces incidents rappellent que la santĂ© des ocĂ©ans est intimement liĂ©e Ă celle des animaux â et la nĂŽtre. Ce ne sont pas les otaries qui deviennent dangereuses. Câest leur environnement qui les rend malades.
đ Ce drame Ă©cologique en Californie est un signal dâalerte, visible, violent, et trop souvent ignorĂ© : la crise climatique nâest pas une menace lointaine, elle est dĂ©jĂ lĂ . Et elle se manifeste jusque dans les comportements des espĂšces que nous pensions bien connaĂźtre.
đą NâhĂ©sitez pas Ă soutenir les associations locales de sauvetage de la faune marine, qui travaillent sans relĂąche pour soigner les animaux intoxiquĂ©s⊠et Ă parler de ces sujets autour de vous. Car derriĂšre les morsures, ce sont surtout les signaux SOS de lâocĂ©an qui doivent nous alerter.