🐑 À Pâques, l’agneau est à l’honneur… mais la filière ovine française peine à se relever

À Pâques, l’agneau est à l’honneur… mais la filière ovine française peine à se relever

Chaque année, la période de Pâques sonne comme un temps fort pour la filière ovine française. Tradition oblige, de nombreux Français prévoient de cuisiner un gigot d’agneau pour le repas familial. Un rendez-vous gustatif important… mais qui cache une réalité bien plus complexe pour les éleveurs.

Un moment de reprise attendu… mais fragile

Pour les éleveurs ovins, Pâques marque un pic de vente essentiel. En Seine-et-Marne, David Tourte, berger et l’un des 115 éleveurs ovins d’Île-de-France, constate :

« Les derniers agneaux ont été vendus. Là pour Pâques, c’est quand même l’agneau pascal. Moi, j’ai 60 brebis, donc ça fait à peu près 50 agneaux en vente par an. Donc c’est important, et puis c’est une tradition de manger le gigot de Pâques en famille. »

Mais cette reprise reste précaire. En 2024, la filière a été durement frappée par plusieurs épizooties, notamment la fièvre catarrhale ovine (FCO), plus connue sous le nom de « maladie de la langue bleue », qui a décimé une large partie du cheptel. David Tourte a perdu 12 ovins, malgré la vaccination :

« On a vacciné pourtant mais on a quand même été touchés. Ça a fait mal, ça marquera l’élevage. Il y a des problèmes sur le long terme. »

Des répercussions durables sur la production

Ces maladies n’ont pas seulement causé des pertes immédiates. Leur impact se fait encore sentir : la faiblesse des animaux infectés a perturbé la reproduction.

« On a des brebis qui ont pris tard le bélier, c’est pour ça qu’on va avoir des agneaux jusqu’au mois de juillet alors que d’habitude on termine fin mai, début juin. »

Conséquence : des retards de croissance, des agneaux moins vigoureux, des pertes économiques invisibles mais bien réelles.

« On navigue à vue avec des maladies qu’on ne connaît pas bien », confie David Tourte.

À cela s’ajoute la menace d’une autre maladie silencieuse : la maladie hémorragique épizootique, transmise elle aussi par des moucherons, et qui peut toucher les ovins sans qu’aucun symptôme n’apparaisse.

Une production nationale insuffisante face à la demande

Aujourd’hui, la France ne produit que 40 % de l’agneau qu’elle consomme. Six agneaux sur dix sont donc importés, principalement de Nouvelle-Zélande, du Royaume-Uni ou d’Espagne. En pleine période de fêtes pascales, il y a donc de fortes chances que l’agneau dans les assiettes ne soit pas français.

La filière ovine peine à se relever, et l’année 2025 commence avec une forte tension : manque de disponibilité des vaccins, moral des éleveurs en berne, et incertitudes sur les prochaines saisons.

« Les éleveurs sont tendus. On n’arrive pas à vacciner à cause de gros problèmes de disponibilité… Ça commence à peser sur le moral », alerte David Tourte.

Un soutien de l’État… mais des attentes persistantes

Face à la crise, le ministère de l’Agriculture a annoncé reconduire cet été la gratuité des vaccins contre la FCO. En 2024, l’État avait commandé 14 millions de doses pour un coût de 38 millions d’euros. Une aide bienvenue, mais qui ne résout pas tous les problèmes.

Un choix de consommation qui a du sens

Plus que jamais, soutenir la filière ovine française passe aussi par nos choix à table. Privilégier l’agneau français, c’est faire vivre nos campagnes, soutenir une agriculture de proximité, et participer à la préservation d’un savoir-faire essentiel.

En cette période de fêtes et de traditions, le gigot de Pâques peut devenir un geste engagé. Et derrière chaque bouchée, il y a l’histoire, souvent discrète, de ceux qui élèvent leurs animaux avec passion, malgré les tempêtes.

19/04/2025 8 h 48 min

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